Renouvellement du Sénat
Questions courantes concernant la représentation gouvernementale dans un Sénat en transformation
Le fonctionnement du BRG dans un Sénat renouvelé.
Le bureau du représentant du gouvernement (BRG) au Sénat a été créé en 2016 à la suite de l’adoption de la politique actuelle du gouvernement qui consiste à nommer des sénateurs indépendants à la Chambre haute. Étant donné que le BRG est un organe relativement nouveau, les Canadiens pourraient souhaiter en apprendre davantage sur son fonctionnement.
La principale responsabilité du BRG consiste à s’assurer que le programme législatif du gouvernement est examiné par le Sénat en temps opportun. Composé de trois personnes, le BRG préconise le renouvellement du Sénat pour en faire une institution moins partisane et davantage indépendante, et pour que son rôle soit complémentaire à celui de la Chambre des communes. L’ampleur des changements apportés au Sénat amène les gens à s’interroger, et plusieurs questions évidentes et moins évidentes sont posées fréquemment. Voici quelques questions et réponses concernant le rôle du BRG et le renouvellement du Sénat.
Pourquoi les membres du BRG sont-ils désignés comme non affilié plutôt qu’en tant que membres d’un parti?
Le caucus du parti au pouvoir à la Chambre des communes ne comprend pas les sénateurs, une décision qui a été prise pour atténuer la partisanerie et accroître l’indépendance au Sénat.
En janvier 2014, Justin Trudeau, alors chef du Parti libéral du Canada et de l’opposition officielle à la Chambre des communes, a annoncé que les sénateurs libéraux ne feraient plus partie du caucus national libéral aux côtés de leurs collègues députés, qui sont des parlementaires élus. L’objectif était de changer le Sénat pour qu’il puisse agir en tant que Chambre de second examen modéré et réfléchi de manière plus indépendante lorsqu’il s’acquitte de ses fonctions d’examen législatif. Cette mesure a préparé le terrain pour la décision, en décembre 2015, de Justin Trudeau, alors devenu premier ministre, de mettre en place un nouveau processus non partisan fondé sur le mérite pour le conseiller au sujet de la nomination de sénateurs indépendants.
Au cours du printemps de 2016, le bureau du représentant du gouvernement non affilié a été établi au Sénat, et deux grands rôles lui ont été confiés : piloter les projets de loi du gouvernement au Sénat et prôner la modernisation au sein de cette institution en transformation. Il s’agissait d’un changement d’orientation par rapport à la pratique qui avait cours au Sénat, à savoir que le leader du gouvernement au Sénat était membre du caucus national dont faisait partie le gouvernement.
Le représentant du gouvernement au Sénat fait-il partie du Cabinet?
Traditionnellement, le leader du gouvernement au Sénat assumait également des fonctions de ministre. L’actuel représentant du gouvernement au Sénat n’est pas un ministre, mais il assiste aux réunions du Cabinet au besoin pour discuter du programme législatif et informer le gouvernement sur le renouvellement du Sénat. Le représentant du gouvernement au Sénat est un membre assermenté du Conseil privé de la Reine pour le Canada.
Étant donné qu’il ne compte que trois membres, comment le BRG s’assure-t-il que les projets de loi du gouvernement sont adoptés?
Le BRG a la responsabilité de guider les projets de loi du gouvernement au Sénat en facilitant la gestion du temps consacré aux débats, en trouvant des parrains pour les projets de loi gouvernementaux et en communiquant de l’information sur les projets de loi, les politiques et les décisions du gouvernement. Toutefois, le BRG ne peut pas obliger les sénateurs à se prononcer en faveur des projets de loi gouvernementaux et il ne le fait pas. Traditionnellement, le parti au pouvoir nommait un whip pour veiller à ce que les parlementaires soient présents en nombre suffisant pour assurer l’adoption des projets de loi. Plutôt que de nommer un whip, le BRG a créé le poste d’agent de liaison du gouvernement, qui, entre autres responsabilités, doit travailler avec la direction des groupes et des partis au Sénat pour organiser les activités de la Chambre haute, ce qui comprend les moments où ont lieu les mises aux voix.
Le BRG peut-il prendre des mesures disciplinaires contre des sénateurs ayant eu un comportement contraire à l’éthique?
Le Code régissant l’éthique et les conflits d’intérêts, dont s’est doté le Sénat, est un code moderne et solide qui décrit les normes de conduite que doivent observer les sénateurs. Le conseiller sénatorial en éthique est responsable de l’interprétation du Code et il peut ouvrir des enquêtes sur de possibles violations. En cas de violation, le Comité sénatorial permanent sur l’éthique et les conflits d’intérêts des sénateurs peut formuler des recommandations de sanctions, de mesures disciplinaires ou de mesures correctives. Le Sénat, dans son ensemble, peut débattre de ces recommandations avant de se prononcer à leur sujet.
Comment le BRG respecte-t-il son rôle quant au renouvellement du Sénat?
Le BRG ne peut pas obliger le Sénat à apporter des changements pour se moderniser; il cherche plutôt à favoriser le changement de l’intérieur. Tous les sénateurs peuvent proposer et étudier des changements à l’institution et se prononcer à ce sujet.
Toutefois, les membres du BRG jouent un rôle d’appui important en proposant des idées, en prononçant des discours, en participant à des tables rondes, en produisant des documents d’orientation et en travaillant à renseigner les Canadiens sur l’approche du gouvernement concernant le renouvellement du Sénat.
Certains tenants de la réforme démocratique font valoir que les sénateurs devraient être élus par les Canadiens. Pour quelle raison les sénateurs sont-ils nommés plutôt qu’élus?
En bref, les sénateurs sont nommés, et non pas élus, parce qu’ils doivent jouer un rôle complémentaire à celui des députés de la Chambre des communes. Comme la Cour suprême du Canada l’a déclaré, aux termes de la Constitution, le Sénat est, dans notre Parlement, qui est bicaméral, l’organe complémentaire qui assure un second examen objectif. Ce rôle est fonction de la nature même du Sénat.
Le rôle de complémentarité du Sénat par rapport à la Chambre des communes s’exprime de diverses manières, dont certaines dépendent entièrement du modèle de nomination.
D’abord et avant tout, le Sénat doit prendre part au processus législatif de telle sorte qu’il ne subisse pas de pressions qui découlent du cycle électoral et des politiques partisanes du jour. Il était attendu que les sénateurs, en ayant un mandat de longue durée, ne placeraient pas les intérêts et le sort de partis politiques au cœur de leurs délibérations.
Une autre caractéristique de la complémentarité est la capacité à conserver un savoir organisationnel et de l’expérience au sein des institutions parlementaires – être la mémoire organisationnelle. La Chambre des communes est caractérisée par un taux de roulement élevé après chaque élection, et il peut être utile, dans le contexte du processus législatif, d’avoir la perspective de parlementaires qui ont suivi l’évolution de politiques au fil du temps et des gouvernements successifs.
Le Sénat a également été créé comme un moyen d’assurer la représentation d’intérêts de minorités et de régions qui ont été sous représentées (et, dans certains cas, non représentés) à la Chambre des communes tout au long de l’histoire. Par exemple, grâce au principe de la nomination, il a été possible pour des premiers ministres d’assurer la représentation au Parlement du Canada de groupes qui, bien que nombreux, étaient trop dispersés dans plusieurs circonscriptions pour être en mesure d’obtenir un siège à la Chambre des communes. C’est grâce au principe de la nomination qu’il a été possible de donner une voix au sein du Parlement à des groupes autochtones, ethniques, religieux et linguistiques qui étaient sous-représentés à la Chambre basse et même d’atteindre un plus grand équilibre entre les sexes qu’à la Chambre des communes.
De plus, et probablement le point le plus important, la complémentarité implique une pratique de déférence raisonnable à l’égard de la Chambre des communes, dont les membres sont des parlementaires élus. Les Pères de la Confédération craignaient qu’une Chambre haute élue finisse par devenir une rivale de la Chambre des communes, par jouir d’un contrôle égal sur les projets de loi de finances et par engendrer des impasses systématiques entre les deux Chambres du Parlement. Comme l’a déclaré la Cour suprême du Canada en 2014, « la décision de confier à l’exécutif la tâche de nommer les sénateurs visait aussi à garantir que le Sénat deviendrait un organisme législatif complémentaire, plutôt qu’un éternel rival de la Chambre des communes dans le processus législatif ». Comme l’a expliqué la Cour, les Pères de la Confédération croyaient que les sénateurs « s’en tiendraient à leur rôle de membres d’un organisme dont la fonction principale est de revoir les lois, et non d’être l’égal de la Chambre des communes » parce qu’ils n’auraient pas la légitimité que confère une élection populaire.
En optant pour le modèle de la nomination pour la Chambre haute du Parlement du Canada, les Pères de la Confédération se sont appuyés sur leur propre expérience avec le Conseil législatif de la Province du Canada, qui est l’ancêtre du Sénat. En 1856, le Conseil législatif a été transformé, passant d’une assemblée nommée à une assemblée élue. Ce changement a été apporté en dépit de l’opposition de certains politiciens de premier plan à l’époque, dont George Brown, qui craignait qu’un conseil législatif élu rivalise avec l’assemblée législative et empiète sur son pouvoir sur les projets de loi de finances. La Confédération présentait une occasion de retrouver la relative sécurité d’une Chambre haute nommée qui fonctionnerait en complémentarité avec une Chambre basse élue. Et les Pères de la Confédération ont saisi cette occasion.
Le Sénat pourrait-il être transformé en Chambre élue?
Bien que la division en deux Chambres ait été maintenue depuis la Confédération, plusieurs gouvernements ont proposé de convertir le Sénat en une assemblée élue. En 2014, la Cour suprême du Canada a répondu à une question posée par le gouvernement fédéral dans un renvoi sur la réforme du Sénat. Elle a déclaré que le gouvernement fédéral ne pouvait pas imposer de manière unilatérale des réformes au Sénat qui changeraient la structure fondamentale de la Constitution, y compris l’instauration d’élections consultatives. La Cour suprême s’est dit d’avis que la transformation du Sénat en assemblée élue aurait pour effet de changer l’architecture de base de la Constitution canadienne, qui a établi un Parlement bicaméral avec une Chambre haute qui serait une assemblée complémentaire (et donc différente) pour assurer un second examen objectif. Selon le plus haut tribunal du Canada :
L’introduction d’élections consultatives en vue de nommer les sénateurs métamorphoserait l’architecture de la Constitution canadienne en confiant à ces derniers un mandat de représentation de la population qui est incompatible avec les nature et rôle fondamentaux du Sénat à titre d’assemblée législative complémentaire chargée de porter un second regard attentif aux projets de loi.
Par conséquent, a déclaré la Cour suprême, un tel changement exigerait le consentement de sept provinces représentant plus de 50 % de la population.
Enfin, il est important de noter que la manière de procéder aux nominations pour pourvoir des sièges au Sénat a beaucoup changé au cours des dernières années grâce à un plan de modernisation destiné à mettre l’accent sur le rôle de complémentarité joué par le Sénat. Vous pouvez consulter les nouvelles directives relatives aux nominations ici.
Le Sénat continue de travailler sur son renouvellement. Quel est le rôle du président du Sénat dans ce contexte?
Le Sénat et la Chambre des communes ont tous les deux un président pour diriger les débats et les délibérations dans leur Chambre respective, mais ces deux rôles sont distincts. Alors que le président de la Chambre des communes est élu par les députés, le président du Sénat est recommandé au gouverneur général par le premier ministre. En ce qui concerne leur droit de vote, le président de la Chambre des communes ne peut voter qu’en cas d’égalité des voix, et le président du Sénat peut se prononcer sur toutes les questions étudiées par la Chambre haute, mais il doit être le premier à voter. Le président du Sénat ne peut pas briser une égalité des voix. En cas d’égalité des voix au Sénat, le projet de loi ou la motion ne sont pas adoptés.
Des observateurs ont affirmé qu’un Sénat plus indépendant pourrait rejeter des projets de loi du gouvernement. Le Sénat rejette-t-il souvent des projets de loi du gouvernement?
Le Sénat rejette rarement des projets de loi émanant du gouvernement qui ont déjà été adoptés par la Chambre des communes, mais bien que de tels cas soient rares, le Sénat a le pouvoir de le faire. Au cours des 50 dernières années, le Sénat a rejeté catégoriquement trois projets de loi du gouvernement. Le cas le plus récent concernait un projet de loi portant sur le réaménagement et l’exploitation de deux aérogares de l’Aéroport international Pearson à Toronto (projet de loi C-28). À l’époque, le gouvernement fédéral se trouvait dans une bataille en justice liée à l’annulation de contrats concernant l’Aéroport international Pearson, et un grand nombre de sénateurs estimaient qu’il était inacceptable que ce projet de loi restreigne le droit des plaideurs concernés par l’annulation des contrats de réclamer des dommages-intérêts en cour. Le 19 juin 1996, le Sénat a rejeté le projet de loi C-28 en troisième lecture, 48 voix contre 48.
Que se passe-t-il lorsque la Chambre des communes et le Sénat sont en désaccord concernant un projet de loi?
Les projets de loi sont des propositions de loi. Les amendements, ou changements proposés, à des projets de loi arrivent fréquemment dans le Parlement bicaméral canadien, et il s’agit d’un élément récurrent dans les activités du Sénat au cours de l’histoire du Canada. Les amendements peuvent avoir lieu à la Chambre des communes ou au Sénat, et les amendements proposés par le Sénat peuvent être acceptés ou refusés par la Chambre des communes. Si la Chambre des communes est en désaccord avec des amendements proposés, elle renvoie un message au Sénat et elle expose parfois les raisons pour lesquelles les amendements ont été rejetés.
Il est très rare que le Sénat insiste pour que soient adoptés des amendements à des projets de loi du gouvernement qui ont été rejetés par la Chambre des communes. Depuis 1960, seulement six projets de loi ont donné lieu à une décision du Sénat d’insister sur une partie ou l’ensemble des amendements qu’il avait proposés après leur rejet par la Chambre des communes. Cela équivaut à environ un projet de loi par décennie. Par conséquent, dans la plupart des cas, il est habituel pour le Sénat de s’en remettre à la volonté des élus. Toutefois, le Sénat a la possibilité d’insister sur sa version d’un projet de loi ou de proposer d’autres amendements qui se rapportent au désaccord et de renvoyer le projet de loi à la Chambre des communes.
Dans les cas, très rares, où le désaccord entre la Chambre des communes et le Sénat a persisté, des conférences ont eu lieu entre les deux Chambres pour résoudre les différends. Ce mécanisme est toutefois tombé en désuétude. La dernière de ces conférences a eu lieu en juillet 1947, après le rejet par la Chambre des communes d’amendements proposés par le Sénat à un projet de loi qui visait à modifier le Code criminel.
Les questions entourant l’égalité et l’équité sont des aspects de plus en plus importants dans les débats publics. Comment le Sénat protège-t-il les droits à l’égalité et représente-t-il les Canadiens qui appartiennent à des communautés minoritaires ou qui vivent en région?
L’un des principes fondamentaux du Sénat est de représenter les divers intérêts des régions et des minorités. Lorsque le Sénat a été créé, en 1867, les femmes et les Autochtones n’avaient pas le droit de voter, et ils faisaient l’objet de discrimination, tout comme les francophones, les néo-Canadiens et d’autres groupes. En 2014, la Cour suprême du Canada a reconnu le rôle historique joué par le Sénat pour représenter les minorités :
Avec le temps, le Sénat en est aussi venu à représenter divers groupes sous‑représentés à la Chambre des communes. Il a servi de tribune aux femmes ainsi qu’à des groupes ethniques, religieux, linguistiques et autochtones auxquels le processus démocratique populaire n’avait pas toujours donné une occasion réelle de faire valoir leurs opinions.
En date de septembre 2017, 44 % des personnes qui siègent au Sénat sont des femmes. Le Sénat est composé d’un groupe diversifié de personnes – dont des membres d’une minorité visible, des Autochtones et des immigrants – qui proviennent de différents milieux professionnels, comme d’anciens juges, enseignants, journalistes, policiers, scientifiques et maires.
Les sièges au Sénat sont répartis par région, plutôt que selon la population, comme c’est le cas pour la Chambre des communes. Cela permet à des régions moins populeuses, comme le Canada atlantique, de mieux se faire entendre au Parlement.
Le français, l’anglais et l’inuktitut peuvent être utilisés dans la salle du Sénat, et l’utilisation d’autres langues peut être permise.